Ça y est : le Québec est recouvert d’un épais tapis blanc, au grand plaisir des amateurs de sports d’hiver... mais pas des cyclistes, qui se voient privés de leur fix de petite reine. Avec les rouleaux comme seule méthadone, ceux-ci attendent vaillamment le retour des beaux jours. Courage : il ne reste « que » quatre mois pour renouer avec le bitume.
Chez les amateurs, cette période de latence hivernale peut porter un dur coup à la motivation. L’ardeur à l’entraînement est moindre. Le goût de se défoncer est absent. On se permet de sauter une, deux, trois séances. Si la situation perdure, on se dirige tout droit dans le mur du sous-entraînement. La saison prochaine pourra paradoxalement en souffrir.
Christiana Bédard-Thom, consultante en préparation mentale et doctorante en psychologie sportive, nous explique comment préserver cette fameuse motivation pendant la saison froide... et au-delà.
La motivation, tout le monde en parle, mais personne ne sait vraiment en quoi ça consiste. Peux-tu nous la définir?
Il existe plusieurs définitions et manières de la conceptualiser dans la littérature scientifique. De manière générale, on peut cependant affirmer que la motivation correspond à une force, à une énergie qui nous dynamise et oriente nos comportements. On reconnaît une personne motivée par son haut niveau d’énergie, d’enthousiasme et d’engagement envers une activité.
Les raisons pour lesquelles on décide de pratiquer notre sport déterminent la forme de motivation qui nous anime. On peut voir la motivation sur un continuum : à un extrême se trouve le manque de motivation, et à l’autre, la motivation la plus autodéterminée, ou motivation intrinsèque. C’est cette dernière qui nous anime lorsqu’on pratique un sport pour le simple plaisir qu’il nous procure.
Entre ces deux extrêmes se situent les différentes formes de motivation extrinsèque. Celle-ci se manifeste lorsqu’on s’adonne à une activité pour des raisons qui nous sont extérieures, comme pour gagner une course, perdre du poids, éviter de décevoir notre coach ou rester en santé.
Donc, comme cycliste, on veut être motivé de manière intrinsèque?
En fait, on veut tendre vers l’extrémité « intrinsèque », puisque cette motivation en est une de qualité. Elle favorise la persévérance et le bien-être, est associée à une diminution du stress et de l’anxiété. Mais, de façon réaliste, il est peu probable d’être motivé de cette façon à 100 %. En matière d’entraînement, on ne fait pas tout par simple plaisir. Pour certains, les étirements, la musculation, les intervalles, ce n’est pas tripant.
Par contre, il est possible d’en venir à être tout de même motivé à réaliser ces activités. C’est ce qui arrive quand on ne cesse de se faire vanter leur importance, par exemple : on finit par les intégrer. On les effectue alors de notre plein gré, même si elles nous procurent peu de plaisir.
Comment favoriser une motivation de qualité?
En se fixant des objectifs. Ce sont eux qui permettent à l’athlète de donner du sens et de la structure à son entraînement. Plus de 500 études sur le sujet statuent que plus un objectif est spécifique et difficile à atteindre (mais pas impossible), plus la motivation est forte, et plus le niveau de performance est élevé.
Le type d’objectifs est aussi important. Des objectifs de performance (temps, classement...), c’est bien quand tu es en pleine saison de compétition, ou quand tu roules à l’extérieur et que tu te mesures aux autres sur Strava. Or, ce n’est pas le cas actuellement, d’où l’importance de se fixer des objectifs de processus. Concrètement, ça implique de s’attarder sur des techniques, des compétences, autant de petits détails sur lesquels on peut facilement axer chaque séance d’entraînement.
Ainsi, chaque entraînement possède un but, ce qui favorise l’atteinte d’objectifs à plus long terme.
Quels sont les autres trucs pour y arriver?
L’environnement dans lequel on baigne a une grosse influence sur la motivation. Il est possible d’établir son propre climat motivationnel. Pour ce faire :
Par où commencer pour garder sa motivation intacte 365 jours par année?
Tout débute par du repos planifié sur une base régulière. S’entraîner, enchaîner des compétitions, réaliser de bonnes performances, ça prend des ressources physiques, mais aussi psychologiques. Ce stress doit être géré par le mental. C’est une question d’adaptation. On peut concevoir notre mental comme un muscle au même titre que nos quadriceps. Lui aussi doit récupérer pour surcompenser, devenir plus fort.
Les périodes de repos sont cruciales afin que notre mental puisse exprimer son plein potentiel quand ça compte vraiment. On peut le voir comme un compte en banque : le repos qu’on y investit maintenant fructifie et finit par payer à plus long terme. Ne pas s’accorder ce temps, c’est se condamner à connaître des plateaux de performance.