Crampes musculaires : après les bananes, les cornichons
Parmi les nombreux désagréments physiques que peut endurer un athlète, les crampes musculaires génèrent autant de grimaces que de douleur. Surgissant souvent au pire moment d’une ride, alors qu’on est en avant, les dents serrées et prêt à donner le meilleur de soi, elles plombent notre fougue et nous tirent de solides jurons. Même si elles sont farfelues, toutes les solutions entendues ou lues sont alors considérées : manger une banane, masser en chantant, boire de l’eau la tête en bas, sautiller sur ses pieds en alternance…
Beaucoup de théories tentent de déterminer la cause des crampes musculaires. Il semblerait que la vérité réside dans un amalgame de déterminants dont l’importance varie selon chaque athlète. La génétique arrive en tête des facteurs, suivie par des aspects neurologiques, la déshydratation et l’apport en électrolytes.
Évidemment, quelqu’un qui a de fortes tendances à avoir une crampe simplement en marchant dans la rue sera sans doute plus à risque d’en éprouver après 100 km de vélo en plein soleil, les bidons à sec. Même si plusieurs solutions sont proposées un peu partout afin de soulager ces crampes qui attaquent encore mieux que notre pire compétiteur, il n’y a malheureusement aucun remède miracle pour une guérison rapide. Comment atténuer le supplice? La meilleure solution est tout simplement de demeurer immobile en attendant que la crampe passe, de masser légèrement la zone contractée vers le cœur et de boire de l’eau.
Mission prévention
Comme le dit le vieux dicton : mieux vaut prévenir que guérir. Mais pour bien prévenir, il faut agir sur les causes où nous avons un impact. Passons donc sur la génétique, qui, malheureusement, ne peut être modifiée. Pour le reste, la théorie nous rappelle qu’il faut en tout temps être bien hydraté, en plus de consommer une bonne quantité d’électrolytes (sodium, potassium, magnésium). Ces minéraux sont évacués par notre sueur, et le déséquilibre ainsi créé peut nuire à une bonne absorption de l’eau et perturber les échanges cellulaires, puis entraîner de la fatigue musculaire… et les fameuses crampes.
Pour les entraînements de moins de 60 minutes, l’eau seule nous permettra de maintenir un bon niveau d’hydratation. Il est recommandé de boire suffisamment dans l’heure qui précède l’entraînement, ainsi que toutes les 20 minutes pendant l’effort. Une alimentation équilibrée et variée dans la journée nous aidera également à refaire convenablement nos réserves en vitamines et minéraux essentiels.
Pour les entraînements de plus de 60 minutes, il est recommandé d’ajouter des électrolytes à notre eau afin de maximiser l’hydratation et de remplacer les minéraux évacués par la sueur. L’eau demeure le liquide de choix, surtout les 45 premières minutes, mais par la suite, il est suggéré de consommer une boisson électrolytique à raison d’au moins 400-500 ml par heure, ou selon votre tolérance et votre volume de sudation. Pensez à bien regarder le tableau des valeurs nutritives : pour une boisson de 500 ml, vous devriez avoir de 300 à 400 mg de sodium.
Le jus de cornichons : la nouvelle panacée?
Parce que parfois, quelques minutes peuvent faire toute la différence en matière de performance, les athlètes sont toujours les premiers à essayer de nouvelles façons d’être plus efficients à l’effort. Vous ne serez donc pas surpris de constater l’engouement sans pareil pour le jus de cornichons. Eh non, il n’est plus l’apanage des femmes enceintes : les cyclistes aguerris s’y mettent aussi! Selon ses plus fidèles partisans, ce liquide consommé avant l’effort permettrait de retarder la venue des crampes, voire de carrément empêcher leur apparition. Pour quelqu’un qui est constamment aux prises avec ce fléau musculaire, cette avenue semble plus qu’alléchante… mais pour le goût, on repassera.
Bien que peu d’études scientifiques se soient intéressées à l’ingestion de jus de cornichons chez les athlètes, on constate qu’une consommation préentraînement semblerait réduire les crampes musculaires en agissant comme agent prophylactique. Cependant, aucune donnée ne nous permet d’affirmer que cette pratique améliore la performance en aérobie ni la thermorégulation. Chez la plupart des athlètes, une consommation allant jusqu’à 200 ml de jus de cornichons de 30 à 60 minutes avant une compétition pourrait réduire la durée des crampes lorsqu’elles apparaissent.
Par ailleurs, sachez qu’une trop grande quantité de sodium avant l’effort couplée à un apport hydrique insuffisant pourrait intensifier les symptômes de déshydratation et l’apparition d’inconforts intestinaux.
Une étude d’intervention croisée[1] s’est intéressée à l’ingestion de jus de cornichons, d’une solution salée ou d’eau plate avant un effort de course à pied sur tapis roulant de plus de 30 minutes, à intensité vigoureuse. Les auteurs pensaient que le jus de cornichons pourrait retarder l’apparition des crampes musculaires et/ou réduire leur durée, comparativement aux deux autres boissons. Les principaux résultats démontrent que l’ingestion de 2 ml/kg de poids de jus de cornichons (75 kg = 150 ml) ou d’une solution hyper saline n’améliore pas la performance, la thermorégulation, ni même le volume plasmatique comparativement à la simple ingestion d’eau.
Par ailleurs, lorsqu’ils comparent leurs résultats avec d’autres études, les chercheurs croient qu’une consommation entre 3 et 7 ml/kg de jus de cornichons pourrait potentiellement améliorer la performance et le volume plasmatique d’athlètes bien entraînés. Mais ils mettent surtout en lumière l’importance de boire suffisamment d’eau pour assurer une hydratation optimale à l’effort et ainsi retarder l’apparition de la fatigue musculaire, en plus de réduire certains inconforts intestinaux.
Par ailleurs, un apport en sodium allant jusqu’à 900 mg avant l’effort via une boisson concentrée pourrait également améliorer la réhydratation et la performance de l’athlète. Ainsi, ce n’est pas tant le jus de cornichons que l’apport en sodium consommé avant l’effort qui agirait positivement sur la performance. En effet, en préservant le volume plasmatique de l’athlète, cela pourrait lui permettre d’améliorer sa thermorégulation tout en retardant la fatigue musculaire et l’apparition de crampes. À noter que les quantités à essayer sont très concentrées, et ne seront donc pas tolérées de la même façon par tous les athlètes. Pour l’athlète, une hypernatrémie (trop de sodium) est tout aussi invalidante d’un point de vue physiologique qu’une hyponatrémie (pas assez de sodium).
Plusieurs façons de s’aider
Parce qu’un aliment en soi n’est jamais la seule solution, retenons surtout qu’avant de se lancer de façon obsessive vers les tendances, on peut soi-même jouer sur quelques paramètres, comme boire suffisamment d’eau avant et pendant l’entraînement et manger convenablement au quotidien, afin de combler nos besoins en vitamines et minéraux et de bien récupérer.
Pour ceux et celles qui vont souvent rouler plus de 60 minutes à des températures élevées, un apport suffisant en électrolytes avant et pendant l’effort est également un facteur clé.
Pour des recommandations personnalisées et adaptées, n’hésitez pas à rencontrer une nutritionniste sportive!
Aliments naturellement riches en magnésium et en potassium
Le volume plasmatique est le liquide qui compose le sang et qui lui permet de bien circuler dans notre corps. Il joue un rôle essentiel dans le maintien des échanges électrolytiques entre le sang et les cellules.
Référence
1. Peikert, J. et autres, « Pre-exercise ingestion of pickle juice, hypertonic saline, or water and aerobic performance and thermoregulation », dans Journal of Athletic Training, vol. 49, no 2, 2014, p. 204-209.