Depuis octobre 2018, le cannabis et plusieurs de ses dérivés sont légaux au Canada. Cette drogue récréative, désormais accessible partout au pays, ainsi que dans plusieurs États américains, était toutefois déjà reconnue pour ses effets thérapeutiques et, depuis 2001, il était donc possible d’en obtenir en ayant reçu une ordonnance de marijuana médicale.
Givrés du CBD
Dans la foulée de la légalisation des produits issus du cannabis, c’est l’explosion du marché du CBD (pour cannabidiol) qui nous intéresse, car cet extrait de la plante, le plus souvent sous forme d’huile, s’adresse à tous les publics. En particulier aux sportifs, visés par une vaste gamme de produits recelant des promesses toutes plus alléchantes les unes que les autres.
Réduction de l’inflammation, amélioration de la concentration, aide naturelle au sommeil, agent de récupération musculaire, anxiolytique… La liste des propriétés qu’on lui prête est impressionnante.
Mais avant d’aller plus loin, savez-vous c’est quoi, exactement, le CBD?
Il s’agit de l’un des deux principaux agents actifs du cannabis. L’autre est le THC : c’est lui qui procure un effet psychotrope. À l’inverse de sa buzzante contrepartie, le cannabidiol n’a pas pour effet d’altérer les sens.
Si vous préférez : ça ne gèle pas.
Ce que prétendent ses apôtres, auxquels s’ajoute un nombre croissant de spécialistes de la santé, c’est que le cannabidiol agit sur le système endocannabinoïde, déjà présent dans le corps humain, ainsi que chez tous les mammifères. La consommation de CBD permettrait de fournir encore plus efficacement les récepteurs du cerveau CB1 et CB2 qui en captent les molécules. Donc, il s’agirait de quelque chose que le corps produit déjà, et on lui en donnerait plus encore pour s’assurer qu’il en a suffisamment pour accomplir son travail.
L’effet, promettent ses adeptes, est un rééquilibrage du corps et du cerveau, donc un retour à l’homéostasie. Bref, tout ce qui agresse le corps serait ainsi repoussé plus efficacement par celui-ci, et les débalancements dans la chimie du cerveau et ailleurs dans l’organisme seraient (au moins en partie) abolis.
Le vrai du faux
Dans tout cet engouement, et en raison du peu d’études sérieuses sur la question, il est difficile, pour le moment, de départager le vrai du faux, le marketing de la science, et donc le fantasme d’un produit miracle de la réalité.
Quant à la commercialisation du CBD, elle est encore ici restreinte aux points de vente placés sous l’égide de l’État (au Québec, la SQDC), ou aux dispensaires qui fournissent les détenteurs d’une ordonnance médicale. Notez qu’à la SQDC, il est pratiquement impossible de trouver du CBD sans THC.
Par contre, le CBD est disponible un peu partout aux États-Unis (dans les États où le cannabis est légal), dans à peu près n’importe quel commerce, sans grand contrôle de qualité.
Là-bas, le CBD est considéré comme un supplément, et non comme un médicament, ce qui lui permet d’échapper à certaines règles de la FDA (Food and Drug Administration, équivalent américain de Santé Canada).
Prudence de mise
Malgré tout ce bel enthousiasme, la science n’est pas encore formelle à propos des vertus du cannabidiol. Dans un article issu de la Harvard Medical School, mis à jour en juin dernier, on souligne que quelques études, ici et là, tendent à démontrer ses capacités à réduire l’inflammation et l’anxiété, et à améliorer le sommeil. Sans plus.
Ce qui ne veut pas dire que ça ne fonctionne pas non plus. Mais des études plus nombreuses permettront de départager le marketing de la réalité, de même que d’examiner les éventuels risques associés à sa consommation.
Comme le précise aussi le Collège des médecins du Québec, il vaut mieux faire preuve de prudence dans l’usage des produits du cannabis. Car on ignore encore exactement quels sont ses effets à long terme (à court terme, il peut provoquer des nausées, de la fatigue et des sautes d’humeur) et s’il s’agit bien d’un remède aussi efficace qu’on le prétend. On ne sait pas non plus, toujours en raison du peu de recherches cliniques effectuées à ce jour, quelles sont les doses et les concentrations souhaitables, selon le résultat escompté.
Attention au dopage involontaire
Et la consommation de CBD comporte bel et bien des risques.
Depuis 2018, l’Agence mondiale antidopage (AMA) ne compte plus le CBD parmi les produits dopants. C’est donc dire qu’officiellement, il n’améliore pas les performances des athlètes. Toutefois, il faut être très prudent, car le THC, lui, figure toujours parmi les produits dopants. Et comme le soulignent plusieurs spécialistes : on ne sait jamais exactement tout ce que contiennent ces produits.
Un peu comme il est de rigueur de consommer des suppléments en faisant extrêmement attention à leur contenu, l’usage de produits à base de CBD par des athlètes susceptibles de subir des tests antidopage est risqué et pourrait entraîner un contrôle positif au THC (qui aurait résisté à une opération de transformation et de séparation mal réalisée), ou à d’autres molécules interdites qui entreraient dans leur composition.
De même, pour la population générale, les produits de CBD qui n’ont pas été avalisés par les autorités compétentes (la FDA ou Santé Canada) ne devraient pas être consommés comme si de rien n’était. Et même s’ils sont reconnus, on devrait en faire usage avec prudence, puisqu’ils agissent différemment d’une personne à l’autre.
En résumé, ça a l’air de fonctionner, mais personne n’est entièrement certain. Il y a toutes sortes de produits en vente, dont plusieurs douteux. La recherche est encore à ses débuts. On attendra encore un peu avant de crier au remède miracle.
Rien à déclarer?
Ne vous avisez pas de traverser les douanes dans un sens ou dans l’autre avec des produits du cannabis, psychotropes ou pas. Bien qu’ils soient légaux au Vermont et au Canada, par exemple, vous n’avez pas le droit de franchir la frontière avec eux.