Tout athlète le moindrement expérimenté sait que l’alimentation peut jouer un rôle majeur dans sa performance sportive. Or, à une époque où la nutrition est un sujet en vogue et où tout un chacun a son opinion sur le meilleur régime alimentaire à suivre, il peut devenir difficile de s’y retrouver. Voire angoissant.
Dans cette frénésie informationnelle, certaines diètes gagnent en popularité. Depuis peu, certains ne jurent que par le régime cétogène, ou keto diet. D’abord proposé comme une solution aux crises d’épilepsie des enfants dans les années 1920, ce régime alimentaire se distingue par un apport minime en glucides (produits céréaliers, fruits, produits laitiers) et un apport élevé en lipides, ou matières grasses.
Ses adeptes croient en ses vertus présumées : perte de poids, réduction du cholestérol sanguin et prévention de certains cancers et du diabète de type 2. Au premier abord, ça semble assez alléchant, mais il faut garder en tête que le suivi rigoureux de ce type d’alimentation est contraignant à long terme et peu compatible avec un mode de vie équilibré.
Gras et endurance font-ils bon ménage?
Opposé au modèle riche en glucides et faible en lipides, le régime cétogène suscite l’intérêt et vend du rêve au goût de beurre… De plus en plus populaire au sein de la communauté sportive, cette diète à la mode est-elle réellement compatible avec le sport d’endurance?
Voyons voir. Selon ce régime, 60 à 75 % de l’énergie consommée dans la journée devrait être sous forme de lipides (matières grasses), 10 % seulement sous forme de glucides et le reste en protéines. Ainsi, pour quelqu’un consommant 2500 calories quotidiennement, ça correspond à 166 à 208 g de lipides et 62,5 g de glucides. En d’autres termes, la quantité maximale de glucides par jour permise correspondrait, dans cet exemple, à l’apport à consommer à chaque heure dans une épreuve physique d’endurance élevée.
Qui plus est, cette modification draconienne des apports en différents macronutriments peut entraîner des désagréments physiologiques comme des troubles digestifs, des maux de tête, des crampes musculaires, une certaine faiblesse générale et une carence en plusieurs vitamines et minéraux essentiels.
Pourtant, la majorité de la communauté en nutrition sportive le reconnaît : un apport considérable en glucides pendant l’effort est important. Il permettrait de réduire la diminution du glycogène et de soutenir la performance athlétique vigoureuse durant une longue période. Toutefois, certains athlètes affirment que le corps pourrait s’adapter à une alimentation riche en gras, en modifiant graduellement sa façon d’utiliser les substrats énergétiques disponibles.
Pas terrible pour l’anaérobie
Récemment, une étude croisée et randomisée s’est intéressée aux effets d’une alimentation cétogène dans un contexte de performance en anaérobie. Les 16 athlètes participants devaient suivre pendant quatre jours un régime cétogène, puis un régime riche en glucides, à une semaine d’intervalle, et comparer leurs performances. Ils ont d’abord réalisé le test de Wingate (sur un vélo stationnaire), qui permet de mesurer la puissance anaérobique maximale. Par la suite, ils ont été soumis à un test de récupération du yo-yo, qui consiste à courir à intensité élevée sur 20 mètres puis à marcher pendant 10 secondes, en alternance, en augmentant graduellement la vitesse de course jusqu’à ce que l’athlète ne soit plus capable.
Les résultats de cette étude ont démontré qu’une diète riche en lipides diminuait de 7 % la puissance maximale et de 6 % la puissance moyenne durant le test de vélo. Pour ce qui est du test en course, on remarque que le temps de récupération était affecté de 15 % avec la diète cétogène, comparativement à celle riche en glucides.
Ainsi, il semblerait qu’adhérer à cette diète sur une courte période (quatre jours) nuise à la performance pour des sports qui nécessitent le système anaérobique, donc des activités à haute intensité.
L’adaptation du corps
Ce qui semble cependant bien établi, c’est que la diète cétogène permettrait au corps de faire quelques adaptations afin d’utiliser en majorité les lipides comme substrats énergétiques à l’effort au lieu des glucides. Notons toutefois que ces adaptations supposent que le glycogène sera d’emblée épargné à l’effort et moins bien régulé par notre métabolisme. Ainsi, une alimentation riche en gras et faible en glucides permet d’utiliser en priorité les gras à l’effort, mais nécessite une plus grande quantité d’oxygène, ce qui n’améliore pas la performance totale.
D’autres athlètes soutiennent qu’en raison des inconforts gastriques importants liés à une consommation considérable de glucides à l’effort, ils préfèrent se tourner vers une alimentation qui prône d’autres substrats énergétiques, comme les lipides.
Une diète contraignante
Par ailleurs, il semblerait que le protocole doive être suivi pendant au moins six mois avant qu’on puisse observer des changements physiologiques adaptatifs. L’envers de la médaille? L’adhésion à une alimentation cétogène, telle qu’elle est prescrite, comporte énormément de restrictions alimentaires. Et si elle n’est pas faite de façon adéquate et avec un suivi rigoureux par un professionnel de la santé, elle risque d’entraîner des déficits en vitamines et minéraux.
Peu compatible avec un mode de vie «normal», ce régime peut faire partie d’une alimentation santé, mais pour des cas précis, où cette routine quotidienne résonne en parfait accord avec les valeurs et les croyances de la personne qui la suit. Parce que malheureusement, manger plus de gras, ce n’est pas seulement remplacer ses fruits par du bacon ou le sirop d’érable par de l’huile. Les fondements d’une saine alimentation passent par un parfait amalgame d’aliments, bien plus que par les nutriments qui les constituent!
Par ailleurs, si vous voulez optimiser vos performances, sachez que la périodisation des glucides reste une solution intéressante… mais on y reviendra dans un prochain article!
Aliments à favoriser : alimentation cétogène vs équilibrée
Cétogène (peu variée)
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Viandes et substituts (œufs, fromage, tofu, noix)
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Beurre, huile végétale, avocats, olives
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Crème 35 %, crème fraîche, mayonnaise
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Peu de fruits
Équilibrée (très variée)
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Fruits et légumes
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Produits céréaliers (surtout à grains entiers)
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Produits laitiers
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Viandes et substituts (œufs, fromage, tofu, noix)
Référence :
MEDICA, E. M., «Low-carbohydrate, ketogenic diet impairs anaerobic exercise performance in exercise-trained women and men: a randomized-sequence crossover trial », dans The Journal of Sports Medicine and Physical Fitness, 2018.